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Sujet : Informations communes aux Emergents....

Emergents: après le bol d'air de l'Opep, la crainte des taux
(12.12.2016 / 11:55:00)

Paris (awp/afp) - Les pays émergents ont bénéficié d'un "bol d'oxygène" avec le rebond modéré du cours du pétrole après la décision de l'OPEP, mais ils se préparent à affronter de nouvelles turbulences avec la hausse attendue des taux aux Etats-Unis.

Frappés de plein fouet par le ralentissement chinois, les pays émergents ont récemment repris espoir: le Brésil pourrait sortir de la récession l'an prochain, le pétrole a légèrement rebondi et des signes encourageants émanent des cours des matières premières.

Mais cette légère amélioration pourrait s'avérer insuffisante pour de nombreux pays qui ont mis en oeuvre de sévères ajustements pour faire face à la chute de leurs revenus pétroliers et des matières premières, à l'image de l'Arabie Saoudite, du Nigéria ou encore du Koweït.

"Pour les exportateurs de pétrole, la récente décision de l'Opep de réduire sa production de pétrole constitue certes une petite bouffée d'oxygène, mais les problèmes sont encore très substantiels", a expliqué à l'AFP Charles-Henri Colombier, directeur de la conjoncture chez COE-Rexecode.

Pour les pays d'Afrique subsaharienne, par exemple, ce rebond reste encore bien timide, comme l'a souligné l'agence de notation Fitch dans une note.

"Même si les prix des matières premières ont repris un peu de terrain, beaucoup de pays exportateurs d'Afrique subsaharienne sont toujours en situation de déficit budgétaire et du compte courant", a-t-elle rappelé.

Le cabinet Capital Economics s'attend d'ailleurs à ce que "ce rebond s'essouffle en 2017, en raison du ralentissement de la croissance dans plusieurs des grands émergents comme la Chine, le Mexique ou encore la Turquie".

- Vers une nouvelle crise? -

Avec ces perspectives, les voyants passent à l'orange. La cheffe économiste de l'OCDE, Catherine Mann, a exprimé ses inquiétudes au début du mois.

"Une haute volatilité des taux de change, associée à des risques potentiels de poursuite des hausses des taux d'intérêts" et de fuite de capitaux, "ce sont les recettes pour une crise bancaire et monétaire dans les pays émergents", a-t-elle prévenu.

Elle a reconnu que ces crises ne s'étaient pas encore manifestées. "Mais nous aimerions voir une activité de l'économie réelle, du commerce international et une croissance plus robustes pour que ces vulnérabilités associées aux marchés financiers soient réduites", a-t-elle estimé.

Pour la Banque de règlements internationaux (BRI), les économies émergentes "sont sous pression", avec des "vulnérabilités extérieures et intérieures". Dans sa dernière évaluation trimestrielle, elle pointe notamment "la hausse des taux et celle du dollar", ainsi que "les déséquilibres provoqués par la récente et rapide hausse du crédit".

Un haut responsable de la Banque Mondiale, Carlos Felipe Jaramillo, a redouté lors d'un forum à Bercy une "ample et insoutenable accumulation de dette dans certains pays émergents et des économies en développement" si la tendance se poursuit.

Le danger, c'est la hausse des taux aux Etats-Unis. Avec le plan de relance des investissements annoncé par le candidat élu Donald Trump, la première économie mondiale pourrait renouer rapidement avec une forte inflation, contraignant la Fed à relever les taux d'intérêts plus rapidement que prévu.

Après sa victoire, les marchés ont commencé à anticiper cela, avec des répercussions parfois brutales sur les devises émergentes. La livre turque a ainsi perdu plus de 10% de sa valeur face au billet vert en novembre.

"La possibilité d'un mouvement sur les taux aux Etats-Unis qui se produit d'une manière plus violente et désordonnée que celle que nous anticipons est l'un de nos cygnes noirs", a reconnu Michala Marcussen, cheffe économiste monde de la Société générale.

"Avec la hausse du dollar et la hausse des taux d'intérêts qui accompagne ce mouvement-là, cette séquence moins accommodante sur la politique monétaire américaine est de nature, évidemment, à contrarier un peu les économies émergentes", a expliqué Florent Delorme, analyste macro chez M&G.

"Nous savons très bien que ça se passe mieux pour les économies émergentes quand on est plutôt dans une politique américaine très accommodante. Donc le cycle qui s'amorce va être plus difficile pour les émergents", a-t-il précisé.

Mais, pour Capital Economics, le grand danger pour les émergents "serait un grand changement de la politique commerciale américaine" avec l'arrivée à la Maison Blanche de Donald Trump qui a promis d'élever les barrières douanières pour protéger son industrie.

afp/rp

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Re : Informations communes aux Emergents....

Que réserveront les marchés émergents en 2017?

Jim O'Neill  (Echo, de ce matin)

Certains observateurs occasionnels pourraient penser que 2016 a été une année décevante pour les marchés émergents. En fait, certains de ces pays ont connu le meilleur rendement en placements de l'année, tandis que certains pays développés s'en sont mal sortis. Si un résident du Royaume-Uni détenant des obligations au Brésil avait placé toutes ses livres sterling en real au début de l'année, il aurait perdu près de 50% de ses investissements.

En effet, le Brésil n'est pas le seul pays émergent dont les marchés ont eu de meilleurs résultats que prévu en 2016. Mais on néglige souvent cela, quand plus de 15 ans après que j'ai inventé l'acronyme Bric (Brésil, Russie, Inde et Chine), les gens regroupent encore un large éventail de pays sous une seule catégorie de "marchés émergents": un terme qui prête finalement plus à confusion qu'autre chose.

Cette approche n'a guère de sens: il n'y a rien de "nouveau" à propos de la Corée du Sud, où le PIB par habitant est proche de celui des pays les moins riches de la zone euro, ou à propos de la Chine, où Apple, l'entreprise la plus emblématique des Etats-Unis, vend plus de produits qu'aux States. La plupart des investisseurs avisés ont probablement compris cela il y a quelque temps, mais d'autres devraient s'en inspirer pour l'année à venir.
Trumponomics

Actuellement les perspectives des économies de marché pour 2017 prévoient que, sous l'administration du nouveau président élu Donald Trump, les Etats-Unis vont développer leurs politiques de relance budgétaire et que la Réserve fédérale va resserrer sa politique monétaire. Cela va par conséquent renforcer le dollar, ce qui risque de créer des problèmes à grande échelle sur les marchés émergents.

Mais il y a quatre raisons de douter de cette idée généralement admise. Tout d'abord, même si les marchés ont eu de bons résultats dans les semaines qui ont suivi l'élection de Trump, les investisseurs doivent se méfier de tout consensus apparent. Personne ne peut prédire avec confiance la future forme des Trumponomics.

La victoire de Trump n'était pas prévue, donc une grande partie des bons résultats depuis le jour de l'élection reflète probablement des ajustements de la part de personnes qui s'étaient fortement positionnées pour le résultat contraire.

Les investisseurs sont maintenant plus confiants que la Fed va continuer d'augmenter les taux d'intérêt, donc ceux qui s'étaient engagés dans une stratégie commerciale (emprunter des dollars pour acheter des devises et payer des taux d'intérêt), ont dû réduire leurs positions. Les investisseurs s'attendent désormais à ce que les marchés émergents les déçoivent. Une nouvelle inattendue sur les Trumponomics pourrait bien en définitive déboucher sur une bonne surprise.
Dollar fort?

Deuxièmement, alors que la reprise de plusieurs décennies dans les obligations pourrait toucher à sa fin, il n'est pas évident que le dollar reste fort indéfiniment, même si son cours est en hausse par rapport aux autres devises à court terme. J'ai longtemps cru que la valeur du dollar avait une tendance naturelle à augmenter. Mais il y a eu de nombreuses occasions où les décideurs américains ont arrêté le renforcement du dollar ou l'ont même délibérément affaibli.

Si Trump veut rétablir l'industrie lourde aux Etats-Unis, il ne voudra pas d'une hausse rapide du dollar. Assurément, de nombreux commentateurs ont prédit que les Trumponomics seraient semblables aux Reaganomics - où Reagan témoignait d'une aversion déclarée face à l'intervention sur les marchés.

Mais l'idéalisme du laisser-faire de Ronald Reagan a été rapidement confronté à la réalité. En 1985, il a accepté l'Accord de Plaza, ce qui a déclenché une dépréciation du dollar sur les marchés financiers internationaux.

Une troisième considération pour 2017, c'est qu'une expansion aux Etats-Unis pourrait bénéficier aux pays producteurs de matières premières, par le renforcement de la croissance cyclique et mondiale. Si les prix des produits augmentent, comme cela a été le cas au cours des dernières semaines, les devises, telles que celles du Brésil et du Chili, pourraient augmenter, puisque leurs termes de l'échange (la valeur des exportations par rapport aux importations) risquent d'évoluer dans une direction positive.
D'abord la Chine

Enfin toute prévision pour 2017 doit tenir compte de la Chine, le gros poids lourd des marchés émergents. Selon une note de recherche récente de Goldman Sachs qui compare les prévisions consensuelles de 2016 avec les performances économiques, la Chine (bien que modestement), a dépassé les attentes.

Les attentes de croissance de la Chine pour l'année à venir, encore une fois, ne sont pas particulièrement optimistes. Mais si l'économie chinoise maintient sa légère accélération depuis l'été, la reprise des actions chinoises va également se maintenir. En outre, même si la croissance globale de la Chine ne s'accélère pas, la demande des consommateurs chinois en produits et services va continuer d'augmenter.

L'augmentation de la consommation chinoise est certainement la tendance économique la plus importante dans le monde actuellement et les populistes d'Occident qui dénigrent le commerce, comme Trump, feraient bien d'être prudents.

En effet, on ne pouvait pas choisir un pire moment pour réduire le commerce avec la Chine, étant donné que les secteurs d'exportation les plus importants de l'Occident ont maintenant l'occasion de puiser dans un nouveau marché.

De même, il y aura sans doute d'autres opportunités de commerce et d'investissements en Inde, en Indonésie, dans les pays d'Afrique et peut-être en Russie. En un mot, l'année 2017 ne sera probablement pas très différente de 2016: certains marchés émergents ne vont pas proposer de nombreuses opportunités d'investissements et d'autres pourraient s'avérer très lucratifs. Et comme pour le Brésil en 2016, dans certains pays, la performance économique globale pourrait ne pas se traduire dans la performance de leurs marchés. Le défi consistera à savoir où cela sera le cas.

Copyright: Project Syndicate, 2016

Ancien président de Goldman Sachs Asset Management, ancien secrétaire commercial au Trésor du Royaume-Uni, professeur honoraire d'économie à l'Université de Manchester